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Dominique CIAVATTI Membre Honoraire de la commission nationale consultative des droits de l'homme Présidente fondatrice d’association humanitaire Membre du comité d’éthique ESPOIR ALZHEIMER |
SPOTLIGHT / LA LOI DU 4 MARS 2002 Bientôt le 15ème anniversaire de la loi du 4 mars 2002. Cette loi dite sur les droits des malades était attendue ; elle s’était assigné beaucoup d’objectifs. Elle avait pris acte en effet des mutations importantes dans la relation entre les patients et le système de santé : elle a donc ouvert la voie à des évolutions majeures de nos institutions sanitaires. Elle a, dans tous les cas, consacré de nouveaux droits pour les patients et jeté les bases de nouveaux rapports, moins paternalistes, plus mûrs, plus éclairés entre malades et médecins. LE CHALLENGE ? : Comment rendre compatibles et complémentaires les droits des personnes malades et les devoirs des professionnels de santé ? comment respecter des impératifs forts d’intérêt général sans méconnaitre le droit des individus ? Comment satisfaire aux exigences de la responsabilité et, simultanément, à celles de la solidarité ? Un dialogue constant s’est instauré depuis l’entrée en vigueur de la loi entre le juge judiciaire, le juge administratif, le Conseil constitutionnel, en particulier par le biais de la question prioritaire de constitutionnalité, la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour de justice de l’Union européenne : aujourd hui la portée de la loi a dépassé largement les attentes du législateur de 2002 . Il s’agit bien d’une réelle émergence de la démocratie sanitaire affirmant et même proclamant les droits des patients, La démocratie sanitaire repose sur la reconnaissance et la mise en œuvre des droits fondamentaux de la personne malade et, plus largement, des usagers du système de santé. Ceux-ci sont multiformes : il s’agit du droit à la protection de la santé, de l’égal accès aux soins, du respect de la dignité du malade, du libre choix du praticien, mais aussi du droit à l’information sur l’état de santé, du droit de prendre avec le professionnel de santé les décisions concernant sa santé – la codécision –, du droit à consentir aux traitements et actes médicaux, du droit d’accès, y compris direct, aux informations concernant la santé. Le Conseil d’État a joué en la matière , un rôle précurseur de protecteur des droits : dès 1957 ,reprenant les conclusions de l’arrêt Watelet de la Cour de Cassation en date de 1885, il avait affirmé que le secret médical est un droit du malade ; dans une décision Milhaud de 1993, le Conseil d’État a jugé que les principes déontologiques fondamentaux relatifs au respect de la personne humaine, qui s'imposent au médecin dans ses rapports avec son patient, ne cessent pas de s'appliquer avec la mort de celui-ci ; il a réaffirmé le droit du patient à disposer des « soins les plus appropriés » ou, ce qui est proche de cette notion sans la recouper exactement, des soins « fondés sur les données acquises de la science », selon la terminologie du code de déontologie médicale. Le droit du malade de consentir aux soins et les limites de ce droit sont réaffirmés ostensiblement : le médecin doit permettre au patient de donner un consentement libre et éclairé à l’acte de soins. Une place privilégiée est désormais accordée aux associations avec une représentation collective des usagers du système de santé (dans le conseil de surveillance des établissements publics de santé, en premier lieu, mais également dans les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation, à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux ou encore les agences régionales de santé) De nouvelles modalités de gouvernance, à l’écoute des patients et non des institutions, permettent une amélioration significative de la qualité de vie pour les patients, notamment en établissements, fondées sur des bonnes pratiques considérées désormais comme partie prenantes du soin. L’obligation de dialogue, de conciliation est inscrite dans les textes et s’impose comme préalable à toute décision : en matière disciplinaire puis qu’elle est un préalable à l’introduction d’une plainte mais aussi dans le mécanisme spécifique de réparation des dommages puisqu’elle s’impose avant tout règlement amiable, lui-même instamment privilégié. De telles dispositions sont essentielles pour fonder la confiance des patients et, plus largement, des citoyens dans le système de santé La loi du 4 mars 2002 est une grande loi de société et même _osons le jeu de mots - la loi d’une grande société : une société qui rejette les féodalités de toute nature, qui dépasse les frilosités, qui fait confiance, qui ouvre la voie .. Elle a tiré les conséquences, dans notre société telle qu’elle est, avec ses exigences et ses impatiences, des formidables progrès accomplis ces dernières décennies par la médecine. Ces progrès scientifiques et techniques, ces progrès médicaux sont désormais davantage orientés vers la prise en compte de la personne humaine, prise dans sa singularité, dans sa globalité, dans son unicité. ESPOIR ALZHEIMER a été à l’initiative et est toujours au carrefour et à l’interface de toutes ces avancées, de toutes ces exigences aussi car le droit du malade ne saurait s’épuiser par l’application d’une disposition mais seulement dans l’accompagnement pour sa mise en œuvre. Communication de Dominique CIAVATTI Membre Honoraire de la commission nationale consultative des droits de l'homme Présidente fondatrice d’association humanitaire Membre du comité d’éthique ESPOIR ALZHEIMER Sources : intervention DE JMSAUVE, vice-président du Conseil d’état, à l’occasion du 10 eme anniversaire de la loi du 4 mars 2002 .